

Pouvez-vous vous présenter ?
- E.G : Je suis actuellement maître de conférences en Science Politique et chercheuse au sein de l’UMR Pacte, dans l’équipe de recherche « Justice sociale ». Après une thèse réalisée dans le champ de l’histoire politique et sociale des idées, mes recherches se sont orientées vers l’analyse des politiques sociales contemporaines. Elles trouvent leur prolongement et une source d’enrichissement dans les enseignements que je dispense et les responsabilités pédagogiques que j’exerce : à l’IUT2 Carrières Sociales au sein de la filièreBUT Animation sociale et socioculturelle (3 ans), et avec Hélène Caune, au sein du Master Villes, Territoires et Solidarités, années 1 et 2, de l’Institut d’Etudes Politiques de Grenoble.
- LV : J’ai soutenu en 2022 une thèse de doctorat en Science Politique à l’UGA portant sur l’éducation populaire en France. Poursuivant mes recherches sur le système éducatif et les pratiques pédagogiques, je suis actuellement en contrat post-doctoral pour l’évaluation du pôle pilote Pégase. Parallèlement, je suis chargé d’enseignement à l’IEP de Grenoble, où j’interviens sur les politiques publiques dans le champ de l’éducation ainsi que sur des enseignements de spécialisation à destination des étudiants se dirigeant vers la recherche académique.
Quel rôle jouez-vous dans Pégase ?
L.V et E.G : Après une déclaration d’intérêt pour le projet PIA3 Pégase, une équipe de politistes intéressés par les politiques éducatives s’est constituée, au sein du laboratoire Pacte, rattachée au Pôle Evaluation du programme. Travaillant depuis l’origine avec Léo Vennin, post-doctorant, j’essaie d’animer cette équipe dont l’objectif est de mener une enquête sur les pratiques et les représentations sociales des acteurs engagés dans Pégase. A partir d’un travail de terrain, il s’agit en d’autres termes d’interroger les dynamiques d’adhésion comme de résistance aux changements induits par la démarche promue par les expérimentations conduites. Dans cette perspective, ce ne sont pas les effets induits sur les performances scolaires qui retiennent l’attention, mais bien la manière dont les enseignants-chercheurs, les enseignants du premier et second degré, et les formateurs des INSPE, s’emparent de la commande publique de transformation des pratiques et d’innovation dans la lutte contre les inégalités scolaires. Par ailleurs, à travers les démarches promues et les « outils » pédagogiques mobilisés, peuvent s’exprimer également les perceptions et les interprétations des inégalités scolaires dans le système éducatif français, dont de nombreuses enquêtes témoignent qu’elles seraient plus prégnantes que dans d’autres pays européens notamment et qu’il s’agit, pour l’équipe de l’UMR Pacte, de saisir et d’analyser.
Pourquoi avez-vous souhaité vous impliquer dans Pégase ? Qu’est ce qui vous intéresse plus particulièrement ?
- E.G : Mes recherches s’intéressent aux notions d’égalité et d’inégalités : de l’égalité des conditions à l’égalité des chances, de l’égalité des droits à la reconnaissance des différences, il s’agit pour moi d’analyser le temps présent à travers les lieux de production, la structuration et la circulation des idées politiques et sociales, comme réalités agissantes et contraignantes. De manière concomitante, j’essaie d’analyser des processus d’élaboration des politiques sociales, d’explorer des logiques de construction des institutions au sens anthropologique, et d’appréhender les rapports des individus (acteurs, agents…) à ces mêmes institutions. C’est cette double préoccupation qui m’a conduite au programme Pégase, persuadée que les processus d’appropriation des réformes scolaires et les outils pédagogiques mobilisés pour lutter contre les inégalités scolaires témoignent de la manière dont l’action publique est la résultante d’une co-construction, produite par des acteurs dont les propriétés, les représentations et les ressources sont à interroger, et ceci d’autant plus dans le modèle républicain français où le référentiel d’égalité constitue à la fois un cadre juridique contraignant et un horizon politique encore indépassable, mais en constante redéfinition.
- L.V. : Le pôle pilote Pégase présente un projet ambitieux de transformation des pratiques enseignantes et de réduction des inégalités scolaires. A ce titre, il représente un point d’observation passionnant pour appréhender par les acteurs de terrain la dynamique du changement en milieu scolaire. C’est précisément ce travail de terrain, à la rencontre des personnels éducatifs au premier rang desquels les enseignants du premier et second degré, ainsi que les enseignants-chercheurs, qui m’intéresse particulièrement. Mes recherches, nourries de ma pratique professionnelle enseignante, tentent de questionner les dimensions politiques de la pédagogie. A ce titre, travailler sur Pégase et sur le courant de l’ « evidence based education » me permet de développer mes recherches en ouvrant un dialogue disciplinaire entre science politique, sociologie de l’école, didactique et psychologie cognitive.